| Le changement climatique va-t-il 
entraîner une perte du vignoble français ? Pour Hervé Quenol, directeur 
de recherche en agro-climatologie, il faudra plutôt observer les 
variations des climats locaux pour proposer des solutions adaptées aux 
agriculteurs. 
 
	Sachant qu'une augmentation moyenne de 1 °C conduit à 
une « migration » des cultures de 100 kilomètres vers le Nord, 
verra-t-on demain des vignes en Suède ? Voilà la question à laquelle 
Hervé Quenol, directeur de recherche au CNRS, avait la lourde tâche de 
répondre pour cette huitième conférence des Mercredis du Pavillon 
France, à l'exposition universelle de Milan.
 Variation et variabilité
 
	Pour bien comprendre ce que représente le changement climatique,
 il faut tout d'abord faire la distinction entre variation et 
variabilité de température. Par exemple, sur une période de 1948 à nos 
jours, on observe une variabilité du climat d'une année sur l'autre, 
certaines années étant plus froides que d'autres. En revanche, si l'on 
agrège l'ensemble des courbes de température sur cette période, on 
constate globalement une variation de la température, qui tend à 
augmenter.
 Phénomènes extrêmes plus fréquents
 
	A l'échelle de la planète, on observe sur la courbe de variation de la 
température ce que l'on nomme une « rupture statistique ». Cette 
dernière a lieu vers la fin des années 1980 et correspond à une 
variation plus intense de la température. C'est d'ailleurs ce que met en
 avant le dernier rapport du GIEC, qui insiste également sur la 
fréquence plus élevée de phénomènes extrêmes comme les fortes pluies ou les sécheresses.
 Des modifications locales impactent les microclimats
 
	La vigne est un marqueur du climat depuis le 
Moyen-âge, à l'image d'une calotte glacière, elle nous en dit beaucoup 
sur le climat passé mais aussi à venir. Cette culture est en effet un 
excellent indicateur, car elle est pérenne et ses différents stades de 
développement sont corrélés avec des indices bioclimatiques
 généralement basés sur une somme des températures. Il est donc simple 
d'observer la variation de ces indices d'année en année et leurs impacts
 sur la croissance de la vigne.
 
 
 Microclimats et... lignes de TGV
 
	Les premiers travaux d'Hervé Quenol portaient sur l'impact de 
l'installation d'une ligne de TGV sur les vignobles de champagne qu'elle
 traversait. Il a montré que les remblais créés par l'installation de la
 ligne de train entraînaient une accumulation d'air froid accentuant 
fortement les risques de gel pour les cultures. Des différences de moins
 quatre à moins cinq degrés étaient observés par rapport à un secteur 
éloigné ne comprenant pas d'obstacles. Ainsi, des modifications locales 
peuvent entraîner des microclimats ayant de fortes conséquences sur la qualité des vins.
 Proposer des solutions adaptées aux environnements locaux
 
	Il est vrai que les modèles théoriques prévoient un déplacement des 
vignobles vers les pôles d'environ 100 km pour une augmentation d'un 
degré de la température. Hervé Quenol préconise toutefois d'observer les
 variations de microclimats, à un niveau très local, afin de proposer 
aux producteurs de réelles solutions d'adaptations. « 
Les vignerons ont une marge de manœuvre pour travailleur leurs vignes 
différemment selon les climats, on est loin de ne plus avoir de 
vignobles en Bourgogne ou dans le Bordelais », insiste-t-il.  
	  
	L'observation des microclimats permettra de proposer aux agriculteurs 
des solutions progressives plutôt que brutales, en modifiant les 
techniques de travail ou en trouvant des cépages adaptés. Il met 
également en avant certaines adaptations plus controversées, des pays 
travaillant en effet à développer des OGM qui ne seraient pas sensibles à
 la sécheresse ou à d'autres évènements climatiques. 
	  
	En guise de conclusion, Hervé Quenol rappelle que les acteurs de la 
filière viti-vinicole ont aujourd'hui pris conscience de l'importante 
émission de gaz à effets de serres  de leur activité, et
 beaucoup travaillent à la réduire. Il ne s'agit pas seulement de 
s'adapter au changement climatique, il faut également contribuer à le 
limiter.
	
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