DROITS DE L’HOMME SANS FRONTIERES Rapport de Mission sur la Situation des atteintes Aux Droits de l’Homme à Teubara (Departement du Lac Léré) N’Djamena, juillet 2011 BP : 4510 N’Djamena Tchad. Tél : (235) 9 992 57 58/ web: dhsf-afrique.org Email :dhsf64@hotmail.com Présenté par LAYIBE TOURDJOUMANE 1 Introduction Après avoir reçu des informatisons diffuses sur la situation de Teubara que notre organisation dans le souci de vérifier ces informations a envoyé une mission qui est descendue sur le terrain. Ainsi, Il y’a de cela quelques années, la population de Teubara accusait quatre personnes de leur village des pratiques de sorcellerie. C’est pour cette raison qu’en octobre 2010, un jeune homme âgé de 23 ans environ aurait été chicoté et torturé par la population pour avoir utilisé dit-on l’âme d’une jeune fille dans son champ (cette pratique occulte existerait dans la région, celle de faire travailler une personne pendant que celle-ci est visiblement couchée de maladie.) Les circonstances de la mort de Beukeubé Daniel, une mort subite et suspecte. Plus grave, le 13 février 2011, lors des élections législatives, les électeurs du bureau N° 3 ne retrouvaient pas leurs noms sur la liste électorale. M. Beukeubé Daniel un jeune de la localité titulaire d’une licence en Droit à l’Université de N’Djamena en chômage, et son cousin Hinpamba Barnabas montaient sur une montagne pour appeler le maire de la ville de Léré afin de pouvoir ouvrir un 3eme Bureau de vote pour les électeurs qui n’ont pas leurs noms sur la liste électorale. De leur retour M. Hinpamba aurait dit à M. Daniel qui va ramener tes papiers chez toi après le vote? (d’après les personnes présentes au bureau de vote le 13 février 2011). Quelques minutes plus tard M. Beukeubé Daniel commença à sentir un malaise. Quelques instants, il succombe à la suite de son malaise. Une mort subite et suspecte. La mort de Beukeubé Daniel a failli provoquer la réaction des habitants de Teubara. La population commençait à soupçonner M. Hinpamba d’avoir utilisé les pouvoirs mystiques pour tuer M. Beukeubé Daniel (A cause de sa question précédemment posée. Qui va ramener tes affaires à la maison alors que Beukeubé était bien portant). L’affaire était atténuée grâce à l’intervention du père du défunt qui a demandé de ne pas manifester ni entreprendre quoi que ça soit après la mort de son fils. Un mois après, une vieille femme dont l’identité n’a été pas été révélée trouva la mort. Là encore, un autre argument a été trouvé. Une autre raison a été trouvée par la. Certains habitants proches de la défunte estiment que M. Passalet Joseph l’aurait touchée à la tête (cette thèse a été surtout soutenue par la maman à BeukeubéDaniel le défunt). Présenté par LAYIBE TOURDJOUMANE 2 Par ailleurs, au moment de la cérémonie des funérailles de la défunte qui est selon la population de Teubara la deuxième victime du groupe des assassins mystiques. En plus, M. Passalet et M. Passiri Gaston ont offert deux (2) cabris pour les funérailles de la vieille femme qui vient de mourir vu que tous ont un lien de parenté. Selon les récits des villageois, (version très partagée dans le village) Alors, Par un simple hasard de la famille endeuillée, les deux cabris n’avaient été égorgés. Deux(2) jours plus tard les cabris ont crevé. Une vive discussion s’empara de la famille de la défunte, les uns disent d’enterrer les cabris et les autres disent qu’il faut les jeter simplement. Le 2e groupe a remporté et c’est ainsi que les 2 cabris offerts par Passalet et Passiri ont été jetés en brousse mains non loin du village. Curieux, selon la population de Teubara qui est unanime sur le sujet, les chiens, les charognards et tous les carnivores qui ont mangé le cadavre de ces cabris sont morts par la suite. Cette même population soutient que ces cabris ont été d’avance empoisonnés afin de tuer un plus grand nombre des personnes qui en mangeraient la chair lors des funérailles de la vieille, parente à Beukeubé Daniel. Raison pour laquelle les personnes soupçonnées notamment : Passiri Gaston, Passalet Joseph, Hinpamba Barnabas, Teudangbé Elie ont été chassées du village. L’association de jeunes dénommée « Groupement des Jeunes Réveillés pour le Développement de Teubara (GJRT) une Ong localement reconnue en 2010 organise des rencontres à chaque pour diverses raisons : • Pour le développement de leur village à savoir : -Aménagement des routes ; -Construction d’une pharmacie ; -Construction d’un bâtiment de salle classe pour le CEG de Teubara et aménagement de quelques bâtiments • Pour faire partir les sorciers de leur village et casser leurs maisons. confirmer. La réunion de l’association du village de Teubara a débordé Au début du mois de Mai 2011, l’association avait tenu une réunion en dehors du village. Au moment de la rencontre, ces quatre habitants présumés auteurs des pratiques de sorcelleries n’étaient pas à la rencontre. A la sortie de la réunion les jeunes ont appris que les quatre personnes mises en cause ont appelé la force de sécurité la brigade de recherche basée à à Léré (chef lieu du Département) de venir les ramener à Léré car il y’aura une bagarre rangée dans leur village. Ayant constaté l’absence de ces quatre personne, l’association a décidé mieux de casser leurs maisons que d’être trahie. Les jeunes garçons et les filles se sont mis à manifester pour démolir leurs maisons, malgré l’intervention de leaders de l’association mais les jeunes déchainés n’ont pas compris et suivi les responsables de leur association. Les responsables qui estiment pour leur part que la réunion n’a rien à Présenté par LAYIBE TOURDJOUMANE 3 voir avec la situation qui prévalait, mais comme eux-mêmes ont voulu, il vaut mieux les chasser loin de Teubara afin que le village puisse vivre en paix. C’est ainsi que Les jeunes se sont mis à démolir les habitations de ces quatre personnes. Alors les maisons des personnes ci-dessus mentionnés ont été démolies par la population en colère. Les leaders de l’association de Teubara sont mis aux arrêts. Deux semaines plus tard les présumés sorciers ont porté plainte contre l’association à la justice de paix de Léré, en particulier contre les quatre leaders de l’Association il s’agit de : -Zoumfièné Gabriel ; -Zoukalné Daniel ; -Kian-euhbo Policarpe ; -Et Lazouné Albert. Arrivé à la justice le 16 mai 2011, ces quatre personnes ont été gardées à vu. Ce qui a irrité la population de Teubara et a soulevé une grande manifestation de la population. Une partie de la population a arrêté les présumés sorciers qui étaient rentrés libres et l’autre partie a pris la direction de Léré pour venir à la justice pour la libération immédiate des dirigeants de l’association. Un nouveau scandale. En venant, la population de Teubara en route vers la justice fut arrêtée par le Chef de Fouli (un chef de quartier non loin du bureau de la justice de paix à l’entrée sud de Léré) a stoppé les meneurs et leur a donné conseils en leur demandant de ne pas aller à la justice mais aller plutôt voir le chef de Canton de Léré qui pourra trouver une solution traditionnelle et culturelle à cette question. Les habitants de Teubara ont accepté et ont alors décidé de changer d’avis et d’aller plutôt chez le Gong (Chef). Toujours selon les témoignages recueillis sur place, dès le départ de la population de Teubara de Fouli, le chef qui a leur a prodigué de bons conseils aurait appelé le chef de Canton au téléphoné au chef de canton. Lui aurait t-il dit selon les mêmes sources, il –ya un soulèvement contre toi qui arrive, prépare toi en conséquence. A son tour le chef (gong) de Canton de Léré avait préparé ses gommiers. Arrivée à Léré la population de Teubara et les gommiers du chef de canton se sont affrontés.la population de Teubara avait prise en guet -a -Pen car ne savait pas ce qui l’attendait. La bataille a duré quelque temps malgré l’intervention des éléments de la Brigade de recherche de Léré. Ainsi, cet affrontement a enregistré quelques blessés comme ci-dessous répertoriés dans un tableau: N° Nom et Prénom Domicile Observation Présenté par LAYIBE TOURDJOUMANE 4 01 Keunomé Bertin Teubara Blessé à la tête 02 Sahnoné Payounni Léré Blessé par Jeudi Constant 03 Mahamat Soudi (gendarme) Léré Blessé à la tête 04 Gabsoubo Keumon Teubara Blessé à la tête 05 Zalba Justine (F) Teubara Blessé à la tête 06 Sougnabé Justin Teubara Blessé à la tête 07 Guepellbé Silas Teubara Blessé à la tête 08 Pallaye Teuchi Léré Blessé à la main 09 Soubbeubé Pagoré Léré Blessé à la tête 10 Gonhinbé Kanabé (gommier) Léré Sagaie non identifiée 11 Pawiyang Padaye Léré Blessé à la tête 12 Passalet Joseph Teubara Blessé à la main L’ordre a été rétabli mais avec plusieurs interpellations. Lors de ce trouble populaire, la police est intervenue ensemble avec la brigade pour calmer la situation dans laquelle elle a pu arrêter sept (7) personnes : -Gariji Gaston ; -Pagoui Keumon ; -Peussoubé Guinbé ; -Kiankika Passalet ; -Laissoubo Passalet ; -Gabsoubo Keumon ; -Chekiné Kalchinbé. NB : ces sept (7) personnes ont été détenues dans un lieu secret pendant quatre( 4) jours avant de les transférer à la maison d’arrêt. Certaines sources proches des personnes interpellées affirment qu’au moment où leurs parents étaient gardés au secret, ils auraient été victimes de la torture. Les personnes soupçonnées des pratiques de sorcellerie auraient été aussi torturées par la population. Ce même jour du 16 mai 2011, les quatre personnes détenues par la population, auraient elles aussi été torturées par la population. Tous auraient été chicotés, attachés les mains dans le dos, chicotant etc. Tous auraient passé (3) jours en brousse à environ trois 3 Km du village (Teubara) où elles auraient été privées d’eau et de nourritures. Comme Toues auraient été victimes des actes de torture, c’est ainsi que lors des séances de ces tortures que d’autres auraient déclaré officiellement qu’elles appliquent par fois de fétiches et les pouvoirs mystiques dans d’autres circonstances selon l’Association de jeunes. Présenté par LAYIBE TOURDJOUMANE 5 La population de Teubara voulait les tuer mais grâce à l’intervention d’un catéchiste de l’Eglise Fraternelle Luthérienne M. Djonfanbé Abel qui est intervenu pour les libérer et les amener à l’Hôpital de Léré pour les soins médicaux. La justice de paix libère grâce au plaidoyer d’un avocat. L’audience de la justice de paix de Léré a eu lieu le 26 mai 2011 qui a pu libérer les onze détenus grâce au plaidoyer d’un avocat Me. Emmanuel venant de Moundou. Les sept (7) derniers sont libérés mais condamnés avec sursis de 12 mois d’après le juge de paix de Léré. Le juge de dire que les plaignants ne savent pas qui a cassé leurs maisons, car il s’agit d’un délit de foule. Il faut normalement identifier les auteurs afin de les juger correctement et individuellement. Quant au Préfet du Département de lac-Léré, la situation est maintenant calme, ils ont pu gérer les conflits. Il ne reste qu’au Chef de Canton de Léré de faire son travail en gérant normalement les villages selon la coutume et la tradition locale. La mission n’a pas pu écouter le chef de Fouli et le chef de Canton de Léré, car ils étaient partis à Figuil. La mission de Goumadji (Pala) Du chemin de retour, la mission devrait s’arrêter à Pala en vue d’aller à Goumadji, une localité située à une trentaine de kilomètre de Pala afin de vérifier si les enfants de M. Abdoulaye stoppés à N’Djamena par DHSF sont bel et bien arrivés dans leur village et y demeurent toujours. (Ces enfants stoppés par DHSF sont envoyés par leur père à des fins de traite au Nord du Tchad.) Mais la mission n’avait pas pu aller manque de moyen de déplacement car pour se rendre dans cette localité il faut partir le dimanche le jour du marché hebdomadaire de Gagal avant de venir à Goumadji. Cela devrait encore prendre plusieurs jours d’attente. Cette mission a été confiée à Serferbé Wandalla, conseiller juridique de la Section de DHSF de Pala. Difficultés rencontrées lors de la mission Au cours de la mission, nous avons rencontré plusieurs difficultés. La vérification des informations n’était pas facile. Certains habitants refusent parfois de donner les informations par peur de représailles éventuelles. Rares sont ceux qui acceptent de se confier ouvertement et publiquement à la mission. De plus, compte tenu de nos moyens limités les déplacements nous ont parfois fait défaut car, il fallait faire plus de cinq villages qui sont distants les uns des autres afin de rencontrer les présumés sorciers chasser de leurs villages. Conclusion : Présenté par LAYIBE TOURDJOUMANE 6 Une mission comme celle destinée à vérifier les informations sur la situation des droits de l’homme à Teubara a été d’une grande importance mais aussi très complexe à cause des caractères culturels des violations des droits de l’homme. Cela nous a permis de voir de façon assez claire ce qui s’est passé dans ce village de la sous préfecture rurale de Léré. Cependant, un problème et plusieurs questions demeurent : en l’absence de l’autopsie donc du certificat du genre de mort, Beukeubé est il mort d’une mort à la suite d’une maladie ou provoqué par une force mystique ? Tout le village croit à une mort provoquée vu les circonstances de cette mort et ce qui s’en est suivi. Pourquoi Hinpamba avait –il posé au défunt la question de savoir qui pouvait ramener ses affaires à la maison alors lui-même était là présent? Quelle réponse donner à la mort des chiens, charognards et tout carnivore mort après avoir mangé la chair des cabris qui auraient été offerts par Passalet Joseph et son groupe ? ont-ils vraiment offerts des cabris ? Pourquoi une justice privée et une expédition sur les maisons des personnes mises en cause ? Quelle réponse la justice ou les autorités administratives ont-elle donné au rôle du chef du quartier de Fouli M. Lachakbé Patchanné qui a créé une bagarre entre la cour du chef de canton (Gong) et la population de Teubara ou ont-elle estimé que cela était faux ou simplement parce qu’il n’y a pas eu de plainte à ce sujet précis? Pourquoi lui-même qui est sous mandat de dépôt délivré par le tribunal de Pala est-il libre.. Quant à nous, nous estimons qu’une enquête sérieuse et approfondie doit être menée par l’administration publique et./ou judiciaire en vue de situer de façon évidente la responsabilité de tous. Une telle enquête qui pourrait associer éventuellement les autorités traditionnelles locales et les associations de défense des droits de l’homme apaiserait les esprits des habitants de Teubara et ceux des mis en cause. Elle évitera aussi que de telles situations ne se reproduisent plus dans l’avenir et éventuellement dans d’autres villages. Surtout si une telle enquête est suivie d’une poursuite judiciaire. Alors, nous attirons l’attention des autorités de la République sur l’implication de certaines autorités locales qui ont un parti pris dangereux qui pourrait dégénérer si un bon règlement n’est pas trouvé. Il est surprenant que l’ensemble des villageois indexent des individus, les citent nommément comme étant auteurs des pratiques de sorcellerie et restent constants sur leur déclaration. Pourquoi eux seulement et pourquoi pas d’autres ? Dans tous les cas, il n’y a jamais eu de fumée sans feu. N’Djamena, juillet 2011. Présenté par LAYIBE TOURDJOUMANE 7